Face au téléchargement illégal en France, la Hadopi est une institution qui a vu le jour il y a désormais plus de 10 ans. L’incarnation de la riposte graduée dans l’Hexagone, après de (pas si) bons et loyaux services, va être remplacé dès 2022 par une nouvelle loi, Arcom. En attendant, voici tout ce qu’il faut savoir concernant la genèse du projet de combat contre l’illégalité numérique.
Vous avez peut-être déjà reçu un mail Hadopi ou une lettre Hadopi. Ceux-ci font suite à un téléchargement illégal qui a été réalisé à partir de votre connexion Internet et visent à vous prévenir que vous êtes dans le radar des autorités. Cependant, comment ça marche tout ça et quel est vraiment l’avenir de l’Hadopi ? Que faire face à un avertissement de la Hadopi et comment, si le besoin s’en fait ressentir, contourner la loi Hadopi ? Si vous n’y arrivez pas, on vous dit aussi quelles sont les sanctions que vous risquez.
C’est quoi la loi Hadopi ?
Tout commence avec une loi du 12 juin 2009 qui a ensuite été complétée le 28 octobre 2009. C’est là que naît la Hadopi, pour Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet. Sa naissance est motivée par la volonté du gouvernement de lutter contre le piratage de films, musiques et séries en France. Plus largement, il s’agit même de tous les contenus artistiques et protégés qui circulent sur Internet, à la demande des ayants droit. Le gouvernement mise donc sur une « riposte graduée » pour défendre le droit d’auteur.
Loi Hadopi : les sanctions
La loi Hadopi ne vise pas directement à sanctionner le téléchargement illégal ou le partage illégal d’œuvres protégées. En effet, il est impossible légalement de prouver qui dans un domicile pourrait être l’auteur d’un téléchargement illégal. Les autorités optent donc pour une approche différente. Il s’agit, en fait, de sanctionner les internautes pour ne pas avoir été capables de sécuriser leur connexion internet. On parle alors de « négligence caractérisée ». On reproche donc aux utilisateurs de ne pas avoir essayé d’empêcher le piratage.
La loi qui régit Hadopi
Il s’agit précisément, dans le cadre de la loi Hadopi, de l’application l’article L336-3 du code de la propriété intellectuelle, qui dispose que « la personne titulaire de l’accès à des services de communication au public en ligne a l’obligation de veiller à ce que cet accès ne fasse pas l’objet d’une utilisation à des fins de piratage ».
Bien plus que des sanctions
Précision utile tout d’abord, la Hadopi ne fait pas que sanctionner le partage ou le téléchargement illégal. La Haute autorité possède au total quatre missions : protection des œuvres sur Internet, encouragement de l’offre de téléchargement légal, régulation des DRM et autres mesures de protection des droits mais aussi labellisation des moyens de sécurisation. Mais c’est bien la première mission qui concentre toute l’attention.
Comment fonctionne la riposte graduée ?
La riposte graduée de la Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet fonctionne ensuite en suivant quatre étapes différentes. La première étape est un mail d’avertissement de la Hadopi. Il est envoyé sur l’adresse e-mail qui est fournie par les opérateurs Internet. Gardez donc l’œil sur votre mail @orange.fr, @sfr.fr ou encore @free.fr. La seconde étape est un avertissement par mail suivi d’un courrier en recommandé avec accusé de réception. La récidive doit se produire dans les 6 mois suivant la première infraction.
La lettre en recommandé d’Hadopi
La troisième étape, dans un délai de 12 mois après la lettre recommandée se déroule alors devant la commission de protection des droits. C’est celle-ci qui peut décider de transmettre l’affaire au tribunal. À noter que, depuis 2015, un courrier papier est parfois envoyé avant la lettre recommandée.
Comment contourner Hadopi ?
Pour comprendre la Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet et comment, si vous le nécessitez, contourner la loi Hadopi et ainsi éviter un avertissement, il faut saisir comment fonctionne le téléchargement. Deux modèles existent. Tout d’abord le téléchargement direct, avec des liens comme ceux que l’on peut trouver sur Zone Téléchargement ou d’autres sites de téléchargement de contenus. Sur ce type de partage de contenus, la Hadopi ne peut pas intervenir.
Le Peer-to-peer dans le radar
Là où la Hadopi peut intervenir c’est sur le réseau peer-to-peer (P2P), qui est notamment connu grâce à des outils comme Emule ou encore BitTorrent. Il faut donc éviter d’utiliser ces plateformes si vous allez choisir de ne pas respecter la législation. Le plus simple reste toutefois de ne pas partager ou téléchargement du contenu illégalement. Sur le réseau peer-to-peer, chaque utilisateur est lié à une adresse IP. C’est celle-ci qui est ensuite détectée par la société nantaise TMG mandatée par la Hadopi pour détecter les adresses IP.
Le cas du streaming et l’utilisation d’un VPN
Par ailleurs, si vous faites du streaming, vous ne pourrez pas non plus recevoir un courrier. En effet, il est impossible pour un tiers de connaître les adresses IP des utilisateurs qui se connectent sur ces sites de streaming. En revanche, une application comme PopCorn Time peut être détectée. Vous pouvez aussi choisir d’avoir recours à un VPN pour contourner les recherches de la Hadopi. Enfin, l’offre légale, désormais florissante (Netflix, Disney+, Amazon Prime Video) peut aussi satisfaire vos besoins.
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Que faire si vous recevez un mail de la Hadopi ?
La première étape est de vous assurer qu’il s’agit bien d’un mail légal et non pas d’une arnaque. Celles-ci peuvent être nombreuses. Sachez aussi que la Haute Autorité pour la Diffusion des Œuvres et la Protection des droits sur Internet ne vous demandera jamais d’argent dans le cadre d’une sanction.
Que faire avec l’avertissement Hadopi ?
Ensuite, vérifiez que l’avertissement est légitime en demandant la liste des fichiers pour lesquels la Hadopi estime vous avoir détecté. Vous pouvez ensuite choisir de vous défendre en expliquant que ce n’est pas vous. Les condamnations liées à la Hadopi sont relativement rares.
La Hadopi face au Conseil Constitutionnel
Au mois de mai dernier, la Hadopi a fait face à un sérieux coup d’arrêt. Le Conseil Constitutionnel a déterminé que la pratique permettant de lever l’anonymat des internautes a été jugée illégale par les Sages. Une décision qui pourrait bien avoir remis en cause le principe même de la Hadopi. En effet, c’est la base même de son système de fonctionnement depuis plus de 10 ans.
Le coup d’arrêt fatal de la Hadopi
La Hadopi a donc du passer par un juge de façon obligatoire pour lever l’anonymat d’un internaute. Alors que le nombre de mails avait déjà considérablement chuté, cette étape de plus lui a porté un coup fatal. Le parlement a approuvé le 29 septembre 2021 un nouveau projet de loi qui remplacerai la Hadopi dès le 1er janvier 2022. Cette nouvelle loi, Arcom, va donc prendre la place de la Hadopi en la fusionnant avec le CSA pour créer une nouvelle entité de régulation.
Le bilan de la Hadopi depuis sa création
Depuis sa création, les actions menées par la Hadopi ont été plutôt positives. Enfin, selon eux ! En effet, elle explique avoir baissé considérablement les pratiques de téléchargement illégaux qui sont passées de 8 millions d’internautes en 2009 à 3 millions en 2021. Mais cette statistique ne s’explique pas que par les actions de la Hadopi mais surtout par l’essor des plateformes de streaming légales ou non. Le téléchargement est aujourd’hui plus rare puisque la connexion est de plus en plus rapide et regarder un film ou une série en streaming et maintenant une pratique adoptée par la majorité des utilisateurs. Un bilan finalement contrasté…
Vers un renouveau ou une évolution de la Hadopi ?
Depuis sa création, la Hadopi a fait face à l’opposition de plusieurs associations centrées sur les libertés numériques comme le French Data Network ou la Quadrature du Net. Cette dernière a émis un communiqué particulièrement acide après la décision du Conseil Constitutionnel. « Si nous avons été nombreux à nous moquer, avant son adoption, de l’inutilité de la Hadopi, il ne faut pas minimiser la nocivité qu’aura eue son action en 10 années. Elle aura vivement dissuadé la population de recourir à la pratique vertueuse, libre et décentralisée qu’est le partage d’œuvres de pair à pair ».
Les limites de la loi Hadopi et l’apparition de nouvelles pratiques
La loi Hadopi visait ce qui était le plus répandu à l’époque, c’est-à-dire les sites de peer-to-peer et notamment le logiciel eMule. Un certain succès puisque ces plateformes sont devenues désuètes et seuls quelques irréductibles continuent de les utiliser. Cependant, le téléchargement illégal a beaucoup évolué durant cette période notamment avec l’offre streaming illégale et les fichiers Torrent. L’apparition de sites miroir, les changements d’url des sites visés par des plaintes ou encore l’utilisation d’un VPN ont montré toutes les limites de la loi Hadopi. Aussi, pour défendre les droits d’auteur, la loi se devait d’évoluer et s’adapter aux nouvelles pratiques. C’est désormais chose faite avec la loi Arcom qui vient d’être votée.
La loi Arcom qui sera en vigueur dès 2022
Conscients des limites de la loi Hadopi et de l’évolution des pratiques du téléchargement illégal, les sénateurs ont largement voté en faveur de la loi Arcom le 29 septembre 2021. Officiellement, baptisé le « projet de loi relatif à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique », la loi Arcom commencera à être appliquée dès l’an prochain avec un champ d’action nettement plus large et des compétences plus étendues pour l’autorité. Les autorités pourront ainsi exiger, de la part des fournisseurs d’accès à Internet et des moteurs de recherche, de bloquer les sites jugés comme offrant du contenu illégal. Une liste noire sera ainsi établie. Cela concernera aussi les sites miroir. Le régulateur de l’audiovisuel français, le CSA, sera aussi mobilisé dans le cadre de cette loi.
Le streaming sportif également dans le viseur de l’autorité
Ces dernières années, l’offre de streaming sportif a explosé sur Internet. Il est très facile de pouvoir suivre une rencontre sportive en direct via de nombreux sites proposant du streaming. Or cela représente un manque à gagner important pour de nombreuses chaînes de télévision qui dépensent des fortunes pour acquérir les droits audiovisuels d’un événement sportif. Ces sites devraient ainsi pouvoir prochainement être bloqués par les autorités après qu’une ligue sportive ait dénoncé au tribunal judiciaire de Paris de telles pratiques de la part d’un site.
La loi Arcom facilement contournée elle-aussi ?
Cette loi devrait largement profiter à l’offre légale comme, par exemple, Netflix, Disney+, Amazon Prime Video, OCS ou encore RMC Sport, Bein Sport et Canal+. Cependant, il est fort probable que de nombreux internautes se refusent à souscrire à une ou plusieurs offres légale car la facture pourrait rapidement grimper pour les amateurs de films, série et de sport. A l’image de la loi Hadopi, la loi Arcom pourrait tout simplement voir émerger de nouvelles pratiques de téléchargement illégal ou de streaming contournant la loi. L’utilisation de VPN, toujours plus répandue pour cacher son adresse IP et même sa localisation, pourrait encore compliquer la tâche de l’autorité. De plus, l’offre illégale a toujours su s’adapter et trouver des failles dans la législation en vigueur comme cela a été le cas avec la loi Hadopi.
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Source(s) : https://www.hadopi.fr/
Bon article mais la mise en œuvre par Hadopi est tellement mal foutu que le risque est nul pour l’internaute avec ou sans VPN, avec téléchargement volontaire ou involontaire, avec ou sans le conseil constitutionnel.
Juste un exemple parmi d’autres que l’on peut utiliser, les recommandations envoyées ont autant de valeur que mon papier toilette usagé sur la base de l’article L331-25 du Code de la propriété intellectuelle – https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000021212113/ – qui pour mémoire précise
« Cette recommandation contient également une information de l’abonné sur l’offre légale de contenus culturels en ligne, sur l’existence de moyens de sécurisation permettant de prévenir les manquements … ».
Je cherche toujours l’information sur l’existence de moyen de sécurisation et chaque fois que j’ai posé la question à l’hadopi, bizarrement ils ont systématiquement botté en touche….
Inutile de même de leur poser la question concernant les actions à mener (NDLR : qui soit dit en passant sont les configs par défaut des box) si ce sont un moyen de sécurisation. Vous n’avez aucune chance de réponse.
Après, oui je suis d’accord que s’attaquer à la source que ce soit financement (Pub), site ou autre risque de limiter le piratage, mais on peut quand même revenir au bon vieux Emule si par hasard tous les sites de liens torrent venait à disparaitre.