C’est officiel, l’opérateur français de satellites Eutelsat a confirmé ce mardi avoir signé un « protocole d’accord » pour fusionner avec le britannique OneWeb et sa constellation. L’opération vise à créer un groupe européen de l’Internet haut débit depuis l’espace et faire ainsi face au colosse Starlink de l’américain SpaceX.
Au-dessus de nos têtes se déploient une nouvelle génération de satellites. Après avoir annoncé lundi être en « discussions […] en vue d’un éventuel rapprochement » avec OneWeb, dont il est déjà actionnaire à hauteur de 23 %, Eutelsat a confirmé la signature d’un « protocole d’accord ».
Combinées, les deux sociétés affirment qu’elles relieront des satellites en orbite terrestre basse (à quelques centaines de kilomètres d’altitude) afin de fournir de l’Internet à haut débit et à faible latence ou délai de transmission des données, essentiel pour répondre à des besoins en forte croissance. L’enjeu est aussi de se lancer dans la course d’un internet mondial et concurrencer les géants américains Starlink et Amazon.
L’Internet par satellite, le prochain défi européen ?
L’Union européenne a développé des programmes de référence au niveau mondial, tels que Galileo – la première infrastructure de navigation et de positionnement par satellite conçue pour des usages civils –, Copernicus – qui fournit un accès autonome aux services d’observation de la Terre et d’information géographique – et EGNOS – qui vise à améliorer la qualité des signaux ouverts émis par les systèmes mondiaux de navigation par satellite, en particulier ceux émis par Galileo.
Découlent de ces programmes une technologie, des données et des services essentiels à la vie quotidienne des Européens et à l’activité économique de l’Union. Grâce aux informations qu’ils fournissent, ils contribuent de surcroît à préserver les intérêts stratégiques de l’Union européenne et de ses États membres (défense , cargos, communications cryptées des États).
Le problème est que l’Europe vit sur les acquis de ses anciens programmes et depuis dix ans, le secteur spatial connaît une transformation et un essor sans précédent à l’échelle mondiale, marqués par l’émergence de nouveaux acteurs et le développement de nouvelles technologies comme Starlink et Amazon, qui révolutionnent les modèles industriels traditionnels.
C’est un fait, Arianespace ne pèse plus grand-chose face aux lanceurs de Space X. L’Europe s’est laissée distancer et pourtant l’enjeu est de taille : il s’agit via ces satellites en orbite basse de garantir l’accès internet à haut débit partout autour du globe. Une alternative, donc, à la 5G et à la fibre, pas toujours rentables. On parle d’un marché potentiel de 3 milliards de clients.
Encore bien des obstacles à surmonter…
Oui mais voilà, Elon Musk a une bonne longueur d’avance, plus de la moitié des 4 408 satellites de sa constellation Starlink a déjà été déployée – l’objectif à terme étant de 42 000. Jeff Bezos, le fondateur d’Amazon, compte de son côté mettre en orbite plus de 3 200 satellites pour sa constellation Kuiper. Enfin, OneWeb a déployé 428 des 648 satellites de sa constellation en orbite basse, un chiffre qui témoigne bien du retard accumulé et qui n’est pas prêt de s’arranger au vue de la situation politique en Ukraine.
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Il y a aussi des enjeux de pouvoir à régler entre actionnaires chez OneWeb qui ne sont pas tous européens. Tous ces facteurs engendrent une situation risquée qui, par ailleurs, avait fait chuter l’action d’Eutelsat de près de 18 % lundi. Mais l’entreprise n’a pas le choix, cette fusion est la solution la plus concrète pour remonter la pente. Si le projet réussi, l’Europe deviendrait alors le principal client de cette constellation et pourrait retrouver sa souveraineté sans dépendre des Américains.