[Coup de gueule] Après 4 ans d’existence à Paris, les trottinettes électriques en libre-service vivent peut-être leurs dernières heures au sein de la capitale. La maire de Paris Anne Hidalgo vient d’annoncer l’organisation le 2 avril prochain d’un referendum pour décider du maintien ou non de ces nouveaux moyens de mobilité douce. Mais est-ce une si bonne idée ?
Quel piéton parisien n’a pas déjà pesté contre les trottinettes électriques en libre-service allant trop vite sur les trottoirs ? Dangereux et peu écologiques, ces moyens de locomotion ont été vivement pointés du doigt depuis leur arrivée en 2018 à Paris – puis progressivement dans les autres métropoles de l’Hexagone. Si bien qu’Anne Hidalgo, actuelle maire de Paris, a décidé d’organiser le 2 avril prochain un referendum pour décider de la survie des trottinettes électriques en libre-service dans la capitale.
Previously, dans « les trottinettes à Paris »
C’est au cours de l’été 2018 que les trottinettes électriques en libre-service ont envahi la capitale ! À l’époque, Paris était un véritable Far West : au total, 12 opérateurs se disputaient le marché. Mais depuis octobre 2019, seuls 3 opérateurs ont été autorisés par la mairie de Paris à déployer leur flotte (Lime, Tier et Dott).
Depuis, les 3 opérateurs ont modifié plusieurs aspects de leur service pour en renforcer la sécurité alors que 236 accidents ont été recensés au premier semestre 2022. Dépassée par l’invasion de ces gadgets, Anne Hidalgo a posé, le 29 septembre 2022, un ultimatum aux opérateurs (Lime, Dott et Tier) afin qu’ils trouvent des solutions pour limiter les usages dangereux et l’encombrement des rues.
Sur la question de la sécurité routière :
À ce jour, aucune étude sérieuse n’existe sur l’augmentation effective des accidents liés à l’utilisation des trottinettes électriques en libre-service. Bien que le sujet soit préoccupant, il n’est à notre sens pas possible de se baser sur le critère du « mésusage » pour justifier l’interdiction ou non de ces nouveaux moyens de mobilité.
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Des opérateurs qui ne s’adaptent pas assez vite
Aujourd’hui, chaque opérateur a le droit de déployer 5 000 trottinettes dans la capitale, ce qui fait un total de 15 000 appareils disponibles à la location de courte-durée. La société Lime estime qu’elle aurait permis à 30 millions d’utilisateurs de se déplacer dans les rues de Paris en 3 ans.
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La question de l’encadrement n’est donc pas à prendre à la légère et après avoir réglementé la vitesse, les lieux de stockage ou l’âge légal d’utilisation, Anne Hidalgo a demandé à nouveau aux marques d’arriver avec des nouvelles propositions pour renforcer la sécurité des utilisateurs.
Les mesures prises par les opérateurs
Les marques ont donc proposé, en novembre 2022, 11 nouvelles mesures visant à renforcer la sécurité sur leurs trottinettes. Parmi elles, 2 sont déjà validées :
- La hausse de l’âge l’égal d’utilisation à 18 ans.
- L’installation de plaques d’immatriculation sur les trottinettes.
D’autres mesures semblent soit difficilement réalisables, soit peu probantes. On y retrouve pêle-mêle :
- Un système expérimental de détection des trottoirs (comment ça marche ? Que se passe-t-il si l’utilisateur roule effectivement sur un trottoir ?)
- Une campagne de sensibilisation au code de la route et une incitation à la marche…
Il est difficile de croire qu’une simple sensibilisation au code de la route suffise à calmer les chauffards de la trottinette, quand une amende de 135 € ne semble pas suffire à faire comprendre qu’elles n’ont pas leur place sur les trottoirs…
Lime, le meilleur élève de la classe ?
La marque Lime a fait parler d’elle en distribuant gratuitement des casques de protection ce samedi 14 janvier. Un geste sans doute opportuniste mais qui semble œuvrer pour davantage de sécurité.
Ces changements n’ont manifestement pas convaincu Anne Hidalgo qui poursuit son effort d’aménagement de Paris afin que les vélos disposent de plus de pistes cyclables dédiées.
Moins de voitures, plus de vélos, c’est le maitre-mot de la maire de Paris qui travaille sans relâche à améliorer la mobilité douce au sein de sa ville. Mais pourquoi n’inclut-elle pas les trottinettes dans cette promesse ?
« C’est un peu le bazar […] On a un vrai problème avec le free floating. Ce n’est pas écolo. Les salariés de ces sociétés ne sont pas correctement protégés. Mon idée, c’est qu’on arrête »
Anne Hidalgo pour Le Parisien
Les trottinettes en libre-service : un gadget polluant
Une trottinette électrique émettrait un peu plus de 100 grammes de CO2 par kilomètre parcouru. Cette empreinte carbone la place, certes, en bien meilleure position que la voiture individuelle ou le taxi, mais bien loin du tram ou du métro (qui divisent leur empreinte écologique par nombre d’usagers).
Mais ce n’est pas tout : l’extraction et le raffinage des ressources pour la fabrication des trottinettes électriques n’est pas sans impact environnemental.
« La batterie lithium-ion et le cadre en aluminium sont les composants ayant le plus d’impact d’un point de vue environnemental, précise leur étude. L’aluminium a un impact particulièrement important, car il représente près de la moitié du poids du véhicule et sa production est très énergivore. »
Anne Aguiléra, chercheuse au Laboratoire ville mobilité transport (LVMT) de l’Université Gustave-Eiffel et coautrice avec Alberica Bozzi d’une revue de la littérature scientifique sur les trottinettes électriques.
La recharge et la maintenance des trottinettes n’est pas à négliger non plus. En effet, lorsqu’un appareil est garé ou abandonné, des collecteurs se déplaçant en fourgonnettes à moteur thermique ont pour mission de le récupérer, le ranger et le redéployer le lendemain…
Qui plus est, cette pollution pourrait tout simplement être évitée car ces moyens de transport sont en réalité en majorité utilisés pour des trajets de 1 à 2 kilomètres. Dans la majeure partie des cas, ces courtes distances pourraient tout aussi bien être effectuées à pied.
Les problèmes sur les autres transports
Mais pour envisager l’interdiction des trottinettes, encore faudrait-il que les autres transports soient en capacité d’accueillir les utilisateurs de ces appareils électriques. Pour rappel, en septembre 2022, la RATP n’avait été en mesure de faire fonctionner que 74% de son offre de bus ! Et pour cause, la fédération Nationale des transports de voyageurs (FNTV) indiquait, déjà à l’été 2022, disposer de 15 000 postes de chauffeurs de bus vacants…
Le même constat peut être fait pour les métros parisiens ! On vous renvoie à l’article détaillé de Libération pour plus de détails. Mais en somme, les problèmes techniques à répétition et les conditions de travail qui se dégradent mènent à des démissions ou des abandons de postes qui se traduisent inévitablement en baisse du trafic assuré.
Ces baisses de moyens mis à disposition s’accompagnent en plus d’une augmentation du prix du pass Navigo ! Est-ce réellement le moment de se séparer d’un transport alternatif ?
Un referendum limité
Tout ne repose pas sur la mairie de Paris et une bonne partie du problème est lié à la gestion de la mobilité en Île-de-France (coucou Valérie Pécresse). Mais puisque les Parisiens ne sont pas les seuls à circuler sur Paris, n’est-il justement pas contre-productif de faire un referendum dans lequel seuls ces derniers sont invités à voter ?
D’autant plus que, comme le montre une étude menée par Lime, beaucoup d’utilisateurs sont des habitants de la périphérie qui utilisent le libre-service pour effectuer les derniers kilomètres de leur trajet.
Plus de régulation ou interdiction ?
Le 17 janvier 2023, le ministre des Transports, Clément Beaune, soulevait une question légitime : l’interdiction est-elle la bonne méthode ?
Car après quatre ans à demander aux opérateurs de modifier leurs offres, de s’adapter à toutes les demandes de la mairie (quitte à faire couler des start-ups), l’irruption d’une potentielle interdiction n’est-elle pas injustifiée ? Notons en plus que le referendum aura lieu en début avril, soit un mois après la reconduite de la licence des opérateurs : à quoi cela sert-il de les prolonger pour potentiellement les interdire après à peine un mois de contrat ?
Toutefois, bien que l’on soit d’accord avec le fond de son propos, la forme laisse à désirer. En effet, l’argumentaire du ministre des Transports ne prend pas en compte le fait que les nombreuses tentatives de régulation de la mairie de Paris n’ont pas porté leurs fruits. Deux points plus que discutables ont retenu notre attention :
- Il semble mettre dans le même panier les trottinettes électriques en libre-service et les trottinettes à usage personnel, or le referendum ne concerne que celles des opérateurs Lime, Dott et Tier.
- Il affirme que la trottinette électrique est un moyen de transport écologique. L’argument fonctionnerait si on parlait effectivement de toutes les trottinettes électriques. Cependant, ce n’est pas le cas et comme démontré précédemment, les appareils en libre-service polluent davantage que le métro, le bus, les vélos (partagés et personnels) ou même les scooters électriques.
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Préférer la trottinette électrique personnelle
Les trottinettes électriques personnelles ont une durée de vie bien plus grande que celles en libre-service. Généralement, on estime qu’une trottinette personnelle dure entre 3 et 5 ans (parfois plus selon l’entretien) alors qu’un véhicule en libre-service ne survit qu’une petite année…
La raison est simple : les modèles en libre-service sont beaucoup plus utilisés et moins bien entretenus que des modèles personnels. Ils s’usent donc plus vite et doivent être changés plus souvent.
À terme, si vous souhaitez utiliser fréquemment ce moyen de transport, l’achat d’un appareil personnel est plus que recommandé. Cet acte est à la fois écologique, mais aussi économique, car les forfaits peuvent revenir vite cher si vous les utilisez quotidiennement (1 € le déverrouillage, puis 15 à 25 centimes la minute). Si vous ne savez pas quel modèle individuel acheter, on vous a concocté un top 15 des meilleures trottinettes électriques.