L’achat de fausses écoutes est un fléau qui ronge l’industrie musicale depuis quelques années, et qui pourrait même venir mettre en péril tout le secteur… Des grandes pop stars aux artistes émergents, presque tous semblent succomber à cette tendance malsaine des « fake streams », en espérant créer le fameux effet « boule de neige » qui leur ouvrira les portes du succès. Coup d’œil sur cette pratique peu scrupuleuse, récemment mise en lumière par une enquête de France Télévisions, et qui attire de plus en plus d’adeptes chaque année.
Spotify, Apple Music, Deezer… Si ces plateformes de streaming sont aussi connues aujourd’hui, c’est parce qu’elles conditionnent en grande partie le succès d’un artiste musical. Et bien que la plupart d’entre eux se tiennent droit dans leurs bottes, en ne trichant pas, d’autres préfèrent passer par la méthode « facile » : l’achat de « fake streams ».
Mais au-delà du fait d’être un investissement douteux, la démocratisation d’une telle pratique risque de fragiliser l’équité que tentent de maintenir les services de streaming et par conséquent, l’équilibre même de l’industrie musicale. D’ailleurs, France Télévisions a récemment dévoilé une enquête, et les chiffres sont édifiants…
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Pourquoi les artistes veulent-ils des streams à tout prix ?
Pour pouvoir percer dans la musique, il faut d’abord se forger une solide communauté de fans. Vous savez, des personnes qui viendront à vos concerts, achèteront vos albums et votre merch… Et vous devez sûrement connaître le célèbre proverbe qui dit que « le monde attire le monde ». Bref, l’argument principal des « clients de streams ».
En effet, la cote des artistes est définie par leur nombre d’auditeurs. Pour faire simple, cela signifie que plus ils seront écoutés, et plus les services de streaming les mettront en avant grâce à leurs algorithmes et leurs playlists éditoriales. L’effet « boule de neige » dans toute sa splendeur !
Une playlist éditoriale, c’est quoi ?
Une liste de morceaux sélectionnés par les équipes de plateformes musicales (Spotify, Apple Music…), qui est mise en avant pour attirer l’attention des auditeurs.
Et les enjeux actuels sont bien plus importants que de simples chiffres, sur lesquels les artistes aiment frimer sans retenue. Car oui, il est désormais possible de remporter de prestigieuses récompenses comme Les Victoires de la Musique ou encore le très convoité Disque d’or, que l’on obtient avec 15 millions de streams en France.
Bien entendu, il y a aussi le fameux argument de la crédibilité. Il faut toujours faire plus de streams pour montrer que l’on est toujours « à la page », que les nouveaux projets plaisent autant que les précédents. Et c’est surtout cela qui pousse certains artistes populaires à tomber dans le piège des « fake streams »…
Une minorité d’artistes peu scrupuleux, mais qui grandit
Des mauvais élèves à tous les étages
Ils ont beau être silencieux, les tricheurs du milieu sont bel et bien là. Et selon nos confrères de France Télévisions, leurs streams représenteraient même « entre 7 et 10% » des écoutes globales sur les grandes plateformes musicales. Une statistique plus qu’inquiétante !
Les observations ont surtout pointé du doigt le rap, un style dans lequel l’ego-trip autour du succès en streaming permet d’écouler de nombreux albums. Le rappeur Ademo (PNL) l’expliquait d’ailleurs très bien, avec sa célèbre punchline « Millions de vues en 24 heures, mon frigo n’a plus peur » !
En bref, pour pouvoir « manger » il faut d’abord streamer ! Et que ce soit avec un casque audio, une paire d’AirPods 4 ou une enceinte Bluetooth, tous les moyens sont bons pour faire monter le compteur ! Et si l’on fait le bilan, plusieurs artistes populaires seraient impliqués. Ninho, Orelsan, Booba, Vald… Aucun ne semble échapper aux suspicions !
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Mais au-delà des pop stars, il y a une véritable démocratisation de l’achat de streams qui s’est opérée au cours de ces dernières années. En effet, il est aujourd’hui possible de gagner plusieurs milliers de fausses écoutes en échange de quelques dizaines d’euros… Si l’on fait la comparaison, entre payer une fortune pour sa promotion et en récolter les effets immédiats pour bien moins cher, le choix semble donc vite fait !
Mais au fait, combien gagne-t-on en fonction des streams ?
Sur les grandes plateformes telles que Spotify et Apple Music, les artistes sont payés au nombre d’écoutes. En général, les tarifs oscillent entre 0,004 € et 0,007 € par stream. Il faut donc compter plus de 300 000 écoutes mensuelles pour pouvoir toucher le SMIC français !
Une pratique en constante évolution
Cette pratique présente tout de même un revers de la médaille. Et oui, les artistes qui s’y adonnent risquent gros : retrait des morceaux concernés voire bannissement de la plateforme ! Mais cela ne semble pas les refroidir pour autant, et les techniques de dissimulation de cette fraude se multiplient…
Pour empêcher la découverte de cette supercherie, certains vendeurs de streams proposent ainsi des formules mensuelles, qui font augmenter les streams de manière plus progressive. Mais en parallèle, les services musicaux redoublent eux aussi d’efforts pour contrer les « fake streams ». Ils peuvent également profiter du soutien de la SACEM (société des droits d’auteur), qui dépose régulièrement des plaintes pour escroquerie.
La tâche reste toutefois complexe, car les streams sont souvent générés par des bots ou comptes piratés, très difficiles à identifier. Sans l’aide d’organismes spécialisés, la lutte contre les fausses écoutes pourrait donc s’apparenter à un combat perdu d’avance…