Un groupe de chercheurs de l’Université de Stanford a mis au point une peau intelligente révolutionnaire… diffusable via simple spray. Capable de reproduire nos moindres gestes, cette technologie porte la promesse de nous débarrasser de nos claviers physiques, voire bien plus.
- Un spray pour appliquer cette peau connectée en quelques instants
- Une peau synthétique pour dire adieu au clavier physique
- Vers un changement plus profond de nos usages numériques ?
- Une peau synthétique intelligente dopée à l’intelligence artificielle
- Une peau révolutionnaire certes, mais qui ne verra pas le jour tout de suite
Lorsque nous utilisons un ordinateur et que nous pianotons sur notre tablette ou notre smartphone, le clavier est un incontournable. Impossible de se passer de lui pour converser, pour travailler, pour nous divertir… impossible, vous dites ? Pas selon une équipe de scientifiques spécialisés en Chimie et en IA qui s’est penchée sur la question dans le cadre de travaux de recherche publiés récemment dans la revue Nature Electronics.
Un spray pour appliquer cette peau connectée en quelques instants
Contrairement à Spider-Man, pas besoin de se faire mordre par une araignée pour avoir accès à toutes les possibilités qu’offre cette peau. Concrètement, cette seconde peau composée de nanomesh est tout simplement diffusée à l’aide d’un spray sur la main et l’avant-bras, à la manière d’un déodorant sur votre corps.
Ce nanomesh présente des particularités assez impressionnantes : c’est une matière constituée d’une couche d’atomes de bores et d’azotes formant un maillage très régulier et associé à du rhodium afin de lui donner un aspect matilique. Découvert au début des années 2000 à l’Université de Zurich, il est utilisé pour sa stabilité dans divers milieux – dont l’air et l’eau – et sa résistance à des températures extrêmes. Ce réseau maillé très sensible est couplé à des minuscules capteurs électriques reliés à des nanofils recouverts d’or et d’argent et à du polyuréthane pour donner un aspect « peau » à la membrane.
« Lorsque les doigts se plient et se tordent, les nanofils du maillage se resserrent et s’étirent, modifiant la conductivité électrique du maillage. Ces changements peuvent être mesurés et analysés pour nous dire précisément comment une main, un doigt ou une articulation bouge ».
Zhenan Bao, professeur de génie chimique à Stanford et chercheur responsable du projet
Chaque mouvement est ensuite transformé en signal et envoyé à un module WiFi accroché à votre bras. Selon les chercheurs, il ne suffirait que de quelques millisecondes pour que l’information soit reçue par l’ordinateur et ensuite traitée. Et pour retirer votre seconde peau, rien de plus simple : un peu d’eau et de savon et le tour est joué.
Une peau synthétique pour dire adieu au clavier physique
Dans la panoplie des accessoires et gadgets que possède Batman, une peau intelligente permettrait à Bruce Wayne de piloter sa Batmobile à distance sans accroc. Iron Man, lui, pourrait sans doute troquer ses mains bioniques par cette peau révolutionnaire afin d’interagir avec les hologrammes qu’il crée pour surprendre ses ennemis.
Mais dans la vraie vie, cette seconde peau synthétique permettrait plus concrètement de pianoter sur un clavier virtuel, rétroéclairé sur un bureau ou sur un mur par exemple. Mais alors, à quoi cela peut-il servir ? L’utilisation d’un clavier virtuel pourrait par exemple réduire la surface nécessaire à l’utilisation d’un clavier physique. Vous gagneriez donc de la place sur votre bureau, surtout si celui-ci est minuscule.
Vers un changement plus profond de nos usages numériques ?
Avec cette peau intelligente, les possibilités sont multiples et ne se limitent pas uniquement au clavier virtuel. La souris pourrait aussi disparaître au profit d’un équivalent holographique, et un joueur de jeu vidéo sur smartphone pourrait utiliser une manette virtuelle pour jouer à ses jeux préférés. Dans un registre médical, cette peau pourrait notamment en télémédecine par des chirurgiens souhaitant contrôler un robot à distance qui simulerait ses moindres faits et gestes dans la salle d’opération en question.
Pour l’instant, cette peau synthétique nouvelle génération n’est qu’en phase de test et il ne s’agit là que d’un prototype. Toutefois, des offreurs pourraient très vite être intéressés par une telle technologie, surtout avec l’émergence du métavers – un monde virtuel présenté comme le futur d’internet et qui souhaite faire disparaitre la frontière entre virtuel et réel. Grâce à cette peau synthétique, il serait possible d’interagir sans avoir à utiliser de manettes ou de smartphone dans les mains.
Une peau synthétique intelligente dopée à l’intelligence artificielle
Tout ce procédé est possible grâce à l’intelligence artificielle et plus précisément à l’apprentissage automatique (ou machine learning). Cette branche de l’IA vise à exploiter un très grand nombre de données et faire en sorte que le modèle « s’en souvienne » pour la réalisation de tâches futures. On parle de modèle « apprenant ».
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Dans le cas de cette peau intelligente, nous parlons même d’apprentissage par renforcement non supervisé. À chaque nouveau mouvement initié par une personne avec sa main, le système s’en souviendra. Il saura donc à l’avenir que la réalisation de ce mouvement correspond à cette tâche en particulier.
Dans le cas d’un clavier virtuel, le système va apprendre le mouvement qu’il est nécessaire de faire pour appuyer sur la lettre « A ». Une fois qu’il s’en souvient, le phénomène est répété pour toutes les touches du clavier ainsi que pour toutes les combinaisons possibles et imaginables pour la ponctuation ou les symboles. Lorsque la peau intelligente est prête, il suffit de tapoter sur le clavier virtuel et voici ce que ça donne :
Une peau révolutionnaire certes, mais qui ne verra pas le jour tout de suite
Au niveau écologique, ce produit semble toutefois controversé. Les aérosols restent la cause principale de l’amincissement et des éventuels trous créés dans la couche d’ozone. Si cette peau intelligente venait à être commercialisée et à se démocratiser, l’utilisation d’aérosols pourrait exploser. Cela serait une vraie déception quand on sait que leur utilisation tend à diminuer ces dernières années.
De plus, le nanomesh reste un matériau cher à produire et une surutilisation de ce matériau de synthèse pourraient faire exploser les prix. Parmi les matériaux les plus chers utilisés dans la conception du nanomesh se trouve le rhodium, dont le prix avoisine les 350 euros… le gramme.
Les chercheurs devront donc peaufiner leur création pour espérer la voir s’immiscer dans nos habitudes. Sa commercialisation reste encore prématurée étant donné les lacunes et nous devrons pour l’heure nous contenter de nos claviers bruyants et nos écrans tactiles salissants.