Le streaming semble avoir enterré les DVD et Blu-ray depuis longtemps. Mais on vous explique pourquoi certains irréductibles cinéphiles ont probablement raison de continuer de préférer le support physique.
Alors que la quantité de films vendus en support physique continue de chuter (-6% entre 2022 et 2021), le chiffre d’affaires progresse (+1% sur la même période). Entre Blu-ray 4K et éditions collectors, le marché du support physique semble survivre grâce à une poignée d’irréductibles acheteurs motivés à payer plus cher leurs films !
Mais pourquoi s’entêtent-ils à privilégier un support physique quand tout est désormais accessible en un clic ? Finalement, ces hipsters du grand écran ont-ils des raisons valables ?
La meilleure qualité vidéo du marché pour l’instant
Vous ne le savez peut-être pas, mais si vous regardez des films en streaming, il y a peu de chances que vous profitiez de l’œuvre à son plein potentiel. En effet, les plateformes préfèrent souvent privilégier le bitrate (le débit de vidéo) à la définition finale.
De manière plus simple : un film pèse lourd et a forciori encore plus un film en 4K. Pour proposer ce type de fichiers et ne pas plomber votre bande passante, les plateformes de streaming compressent les films grâce à des codecs.
C’est quoi un codec ?
Un codec est ce qui sert à réduire le poids d’une image en créant des agrégats de pixels. Au lieu de calculer chaque pixel d’une image un à un, le logiciel comprendra que « tel pixel noir est à côté d’un autre pixel noir » qu’il peut donc les fusionner et ne compter qu’un seul gros pixel plutot que deux petits : réduisant ainsi le poids du fichier global.
Aujourd’hui, Netflix a fait d’énormes progrès sur les codecs et utilise des versions extrêmements puissantes qui s’adaptent en temps réel au contenu que vous regardez et au support sur lequel vous le regardez. Malheureusement, une forte compression signifie aussi une perte d’informations que le Blu-Ray 4K ne connait pas, car au lieu de tenir sur un fichier de 2 Go, celui-ci peut s’étaler sur 100 Go !
Il ne faut toutefois pas exclure l’hypothèse que dans un avenir plus ou moins lointain, les plateformes soient en mesure de compresser leurs fichiers avec une perte infinitésimale d’informations et de n’avoir des défauts visuels perceptibles uniquement à l’échelle quantique (comme Modok, en fait).
Le Blu-ray UHD a le meilleur son !
Du côté du son, c’est à peu près le même constat : tandis que le Blu-ray permet de proposer un son « lossless » (autrement dit sans perte), les plateformes de streaming compressent leurs fichiers sons…
A titre d’exemple, si vous regardez Avatar 2 sur Apple TV, vous pourrez profiter d’un son Dolby ATMOS tiré du Dolby 7.1+, c’est-à-dire une version compressée et donc avec perte…
Fort heureusement, cette perte de donnée à la compression ne se traduit pas par une diminution de basses ou de médiums, mais le son sera globalement moins vif et moins percutant.
Seule la plateforme Bravia – exclusive à Sony – peut se targuer d’offrir une qualité similaire au Blu-ray UHD 4K grâce à son bitrate solide de 80Mbits. Mais la compression sonore, elle, est toujours présente.
Le Blu-ray : le support idéal pour les cinéphiles !
Devant toutes ces considérations techniques, vous pourriez nous rétorquer que ça ne vous dérange pas tant que ça de ne pas avoir une restitution 4K optimale ou que vous n’entendez pas la différence entre un son lossless et un compressé.
Alors, pour les moins férus de technique, voici d’autres arguments qui font du Blu-ray le support idéal pour voir et revoir vos films préférés.
La véritable sauvegarde de VOS films
Saviez-vous que les plateformes de streaming peuvent être amenées à supprimer des passages de vos contenus préférés ?
On se souvient encore de Netflix supprimant la scène du suicide dans 13 reasons Why ou de la censure puritaine de Disney+ sur le film Splash… Posséder la version physique est l’assurance que la version initiale de l’œuvre existera toujours quelque part, pour le meilleur comme pour le pire.
En dehors de la censure qui reste minoritaire, acheter un Blu-ray est un moyen sûr de ne pas dépendre du catalogue des plateformes. La programmation des services SVOD changent perpétuellement et vous n’êtes jamais certain de retrouver vos films préférés dessus (même ceux que vous avez achetés). D’autant plus que certaines sagas sont parfois éparpillées sur plusieurs plateformes différentes…
Ainsi, en adoptant le Blu-ray, vous resterez maître de votre bibliothèque de films (à condition qu’elle ne brûle pas comme dans Le Nom de la Rose).
Les vraies versions des œuvres cinématographiques
Et si on vous disait que le support physique offre la version la plus fidèle du film originel ?
Bien plus encore, le support physique a l’avantage non négligeable de pouvoir offrir une version « Director’s Cut« , autrement dit la plus fidèle du film – sans trop de scènes coupées – imaginée par son auteur. Bien souvent, la différence est moindre, mais il suffit de jeter un regard à la filmographie de Zack Snyder pour s’apercevoir que des dizaines de minutes de film manquent à l’appel (fourchette indicative : entre 40 minutes et +l’infini).
Ces Director’s Cut, au même titre que les versions longues, sont rarement proposées par les plateformes et bien plus souvent incluses en éditions physiques. Une occasion en or pour les collectionneurs.
Nos distributeurs ont du talent
Au-delà de l’argument de fidélité, il faut aussi ajouter que les distributeurs de Blu-rays se donnent du mal pour offrir du contenu additionnel. Et cela va plus loin que simplement placer une disquette dans un boitier bleu.
Carlotta, ESC, The Jokers en passant par les plus mainstream comme Warner avec ses éditions Titan of Cult, toutes ces sociétés de distribution proposent régulièrement des making-of détaillés, des entretiens exclusifs, des scripts originaux, des posters, des coffrets steelbook ou des pin’s… pour enrichir leur offre et inciter les cinéphiles souhaitant approfondir l’expérience à acheter leurs éditions collectors.
La cinéphilie, c’est le partage !
« T’as pas vu *entrer le nom d’un film* ? Tiens, je te prête mon Blu-ray, on s’en reparle après ». Tout comme il est plus simple de prêter un livre qu’une liseuse à sa famille ou ses amis, le support physique se partage sans le moindre souci !
Bon, on vous l’accorde, cet argument sent un peu le « C’était mieux avant…» mais ça reste tout de même bien plus tangible qu’une simple recommandation de visionnage que votre interlocuteur ajoutera dans sa longue liste de « films à voir ».
Les arguments pour ne pas acheter un Blu-ray
Si le Blu-ray reste convaincant à bien des égards, pourquoi le grand public semble de plus en plus le bouder ?
Les Blu-rays sont chers
Autant mettre les pieds dans le plat d’entrée de jeu : oui, c’est cher. Si on prend le parti de vouloir la meilleure image et d’acheter exclusivement de la 4K : il faudra au minimum payer 25-30 euros pour un Blu-ray alors qu’il ne vous en coûtera que 14,99 euros sur une plateforme de streaming comme Apple TV+. Le constat reste également vrai pour les Blu-rays classiques (sans UHD) – d’autant plus si on lorgne du côté des éditions collectors où le prix grimpe rapidement vers les 30 € (et plus si affinités).
Toutefois, le marché de l’occasion pourrait bien achever de vous convaincre, d’autant plus que le prix moyen reste toujours très abordable. En dehors des films peu distribués ou des éditions collectors, les Blu-rays ne prennent pas de valeur, bien au contraire… Ainsi, en vous baladant sur des sites de reventes d’occasion, vous ne galérerez pas à trouver des Blu-rays entre 1 et 5 euros !
Le seul risque financier est de développer ce que certains appellent « la collectionnite aiguë » mais là, on ne peut rien pour vous…
Les Blu-rays demandent trop d’équipement
On vous le dit tout de suite : autant en rester au streaming si vous n’utilisez que les enceintes intégrées à votre vieux téléviseur.
Cela va de soi, pour profiter au mieux de vos films en Blu-ray, il faudra a minima être muni d’un lecteur Blu-ray (ou d’une PS5) mais également d’un home cinéma, d’un écran 4K et d’enceintes compatibles au Dolby ATMOS.
Et pour finir, un argument évident, mais non négligeable : l’acheteur de Blu-ray devra nécessairement investir dans des étagères dignes de ce nom pour faire de son salon un authentique vidéoclub.
Vos figurines et autres objets de geeks cinéphiles y trouveront facilement leur place.
« Il n’y a pas tous les films »
Malheureusement, le Blu-ray n’est pas la solution ultime pour posséder tous les films et certaines œuvres peinent à trouver un chemin vers les étagères des cinéphiles… Il n’y a qu’à s’intéresser à The Abyss, qui va enfin sortir officiellement en Blu-ray 4K après plus de 20 ans sans version physique décente.
On vous rassure, le catalogue Blu-ray reste bien plus vaste que celui du streaming mais c’est sur le terrain de la nouveauté que cela pêche. Si demain un grand film est proposé en 4K, la plateforme peut mettre à jour son fichier en quelques minutes sur ses serveurs. Le Blu-ray, lui, devra nécessairement être reproduit et vous devrez obligatoirement passer à la caisse pour récupérer une édition physique.
Le support physique pollue plus que le streaming
Aucune étude ne tranche réellement le débat de la pollution du streaming ou du Blu-ray (on vous en donne 3 si vous voulez approfondir le sujet : le ShiftProject, GreenIt et Ademe) et ce pour plusieurs raisons.
Cela dépend de votre usage : le film en support physique pollue beaucoup à sa création (plastique et disque) et à son acheminement, mais nettement moins au moment du visionnage, alors que le streaming fera fonctionner des gros data centers à chaque fois que vous voudrez regarder une œuvre sur la plateforme…
Certes, les différentes plateformes de streaming font des efforts pour limiter leur impact sur l’environnement – notamment en optimisant la consommation de leurs serveurs.
Mais avec la démocratisation du bingewatching, les effets rebonds impliquent logiquement plus d’impact sur l’environnement…
Bien sûr, il faut vivre avec son temps et il semble compliqué de se tenir seul face au vent en niant les évolutions des plateformes de streaming. Ces améliorations sont d’ailleurs loin d’être terminées et il suffit d’observer les efforts de Netflix pour s’en apercevoir.
En attendant, le Blu-ray reste une valeur sûre, mais rien ne dit que le streaming ne pourrait pas à l’avenir – à coup de prouesses techniques – détrôner le support physique en délivrant une expérience similaire, voire supérieure.