La start-up française BeFC (Bioenzymatic Fuel Cells) a mis au point une pile composée principalement de papier et de sucre entièrement biodégradable. Destinée à remplacer les piles boutons des dispositifs électroniques jetables, cette technologie pourrait contribuer à limiter la pollution causée par l’industrie des piles et des batteries.
Grâce à BeFC, les mots « pile » et « durable » pourraient peut-être enfin s’accorder, du moins pour certains usages. La jeune start-up a en effet conçu une biopile exclusivement constituée de papier carbone, de glucose et d’enzymes. Sans métal, ni plastique, elle pourrait ainsi être une vraie alternative pour rendre plus durable nos moyens de stockage d’électricité.
Un procédé écologique et révolutionnaire
Protégé par six brevets, le principe de fonctionnement de cette biopile repose sur l’action d’enzymes spécifiques immobilisées entre plusieurs couches de papier carbone. Jules Hammond, CEO de BeFC, expliquait dans une interview de juillet 2022 que « Les enzymes, immobilisés entre ces couches, jouent le rôle de catalyseur naturel. Ils transforment des substrats comme le glucose ou l’oxygène en électricité.«
Cette biopile, également appelée biocellule, peut être activée à la demande au simple contact d’un fluide. Il peut s’agir d’eau mais également de sang ou d’urine en cas d’application médicale. Avant son activation, elle peut être stockée plusieurs mois sans perdre en capacité (seulement 4% en 18 mois).
De nombreuses applications
Si ces biopiles ont, pour le moment, une puissance très limitée (environ 2,5 milliwatts par centimètre carré), elles permettent de répondre à des usages particuliers, comme par exemple :
- Le smart packaging et la logistique en permettant par exemple la vérification en temps réel de l’état d’un produit pendant le transport,
- Des dispositifs médicaux tels que des tests de grossesse, des patchs pour le diabète, etc.
- L’Internet of Things, soit une grande partie des objets du quotidien qui deviennent de plus en plus connectés.
BeFC fabrique également des cartes électroniques appelées « Digital Platform » alimentées par cette biopile. Ces cartes permettent de mesurer certaines constantes comme la température, l’humidité ou la pression à l’aide de capteurs. Elles sont munies d’un microcontrôleur, une mémoire ainsi qu’un module de communication permettant par exemple de partager les données avec un smartphone.
Le fruit de 40 années de recherche
Issue du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique), la start-up BeFC est l’aboutissement de près de quarante ans de recherche. A l’origine de ce projet, les chercheurs du CNRS étudiaient la possibilité de créer un biocarburant capable d’utiliser le sang et l’oxygène présents dans le corps humain afin d’alimenter des dispositifs médicaux comme des pacemakers. Depuis, l’idée à fait du chemin jusqu’au procédé actuellement utilisé dans ces biopiles enzymatiques.
L’entreprise, qui fournit déjà une dizaine de clients, est actuellement en train d’optimiser ses lignes de production afin de passer d’une production actuelle de 1000 biopiles par jour à environ 1 million d’unités par jour en 2024.
La solution à un désastre écologique : le recyclage des piles
Les piles nous sont indispensables au quotidien, en témoignent les 226 000 tonnes vendues chaque année rien qu’en Europe. Pourtant, elles représentent un véritable désastre pour l’environnement du début à leur fin de vie. À titre d’exemple, la fabrication d’une pile alcaline nécessite environ cinquante fois l’énergie qu’elle contient.
Le recyclage des piles déchargées est très aléatoire. On estime que seulement 45% des piles usagées sont recyclées en Europe. En Chine, ce chiffre descend à 2%. Pourtant, leur recyclage est un enjeu majeur pour la protection de l’environnement. Une seule pile bouton usagée, de par les matériaux qui la composent comme le lithium, peut contaminer à elle seule 1 mètre cube de sol pendant 50 ans.
Si les solutions de recyclage se développent petit à petit, le développement de nouvelles technologies de batteries moins polluantes serait une véritable avancée environnementale pour cette industrie.