Dites bonjour à la petite nouvelle sur la Toile : Artifact, une application de lecture d’articles qui promet, grâce à une intelligence artificielle, de vous faire des sélections de news sur mesure et adaptée à vos habitudes.
Artifact, c’est le nom de la nouvelle application développée par Kevin Systrom et Mike Krieger, les fondateurs d’Instagram. Annoncée comme le TikTok de l’information, cette application veut remettre l’actualité sur le devant de la scène en proposant à son utilisateur une sélection personnalisée d’articles de qualité. Pour réussir ce pari, cette sorte de « Google Reader » réinventé mise tout sur son algorithme et n’hésite pas à s’inspirer de l’algorithme d’une plateforme en vogue chez les plus jeunes d’entre nous : TikTok. Mais au-delà des promesses, décortiquons ensemble le fonctionnement d’Artifact pour mieux comprendre ce qu’il vaut.
Le nom Artifact vient de la contraction de Facts pour faits d’informations, et Arti comme Artificial Intelligence. Tout un symbole.
Du contenu personnalisé grâce à l’IA
Le principe est simple : plus vous lisez d’articles qui vous plaisent, plus l’algorithme vous proposera des contenus qui vous correspondent. Et Artifact vous conseille par ailleurs de consommer au moins 25 articles avant que la plateforme ne décèle vos affinités.
Les deux créateurs, qui ont fondé Instagram en 2010 et l’ont ensuite déserté en 2018 suite à un désaccord avec Mark Zuckerberg, ont partagé prendre le temps de peaufiner le cœur de leur machine à recommandations avant de la mettre sur le marché. Par ailleurs, Kevin Systrom expliquait récemment à The Verge avoir constaté que ces dernières années, le machine learning a considérablement œuvré pour l’amélioration de l’expérience utilisateur.
En 2020, les deux inséparables ont décidé de surfer sur la vague de la nouvelle technologie « Transformer », un modèle d’apprentissage profond inventé par Google en 2018 pour le traitement automatique des langues. Cette même technologie publiée en opensource qui sert aujourd’hui de base à ChatGPT.
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Une application bientôt disponible en version bêta
L’application est d’ores et déjà téléchargeable sur Android et iOS mais le nombre d’utilisateurs est cependant pour le moment limité (les retardataires peuvent s’inscrire sur liste d’attente). L’application promet une interface simple, lisible et faisant la part belle au contenu personnalisé. En soi, rien de bien révolutionnaire et le constat reste le même du côté de la version test qui comprend :
- Une fenêtre pour suivre l’activité de ses amis
- Une autre pour leur envoyer des messages ou en recevoir
- Un flux « Pour vous » qui rassemble les contenus adaptés à vos centres d’intérêt
Si l’application est présentée avec un concept « nouveau », il faut avouer que les premières images de l’interface ne semblent pas présager une rupture vis-à-vis de ce qui existe déjà de similaire sur le Web. On peut notamment penser à Google Discover, voire même Twitter, qui de fait ont déjà recours à des algorithmes de recommandation. Pourquoi Artifact serait-il exempt des mêmes écueils rencontrés par les grandes plateformes avec leurs propres systèmes de recommandation ?
Pourquoi Artifact prend TikTok comme exemple ?
Si Artifact est comparé à TikTok, c’est justement parce qu’il apprend tout seul à identifier vos habitudes, développent ses propres critères d’analyse et vous propose ensuite du contenu sans réellement vous expliquer pourquoi cela reste pertinent à ses yeux.
« J’ai vu ce changement et je me suis dit : Oh, c’est l’avenir du social », a déclaré Systrom. « Et ce qui était drôle pour moi, c’est que lorsque je regardais autour de moi, je me disais : Mec, pourquoi cela ne se produit-il pas partout sur les réseaux sociaux ? Pourquoi Twitter est-il toujours principalement basé sur le suivi ? Pourquoi Facebook ?« . Ce dernier fait valoir des algorithmes auto-apprenants et non « explicitement créés ».
Avec ce système, les contenus devraient à priori être adaptés avec précision à vos attentes (un peu à la manière du robot apprenant Flint). Mais certains utilisateurs ont déjà pointé un manque de personnalisation qui a tendance à mettre en avant des contenus très neutres ou bien de média très généralistes.
Tant que nous n’aurons pas plus de détails sur le fonctionnement de l’algorithme, il restera difficile d’affirmer que le risque d’enfermement idéologique est atténué ou accentué. Lorsque vous vous rendez chez un marchand de journaux, vous choisissez sciemment un média plutôt qu’un autre. Mais si le marchand de journaux change son étale pour vous, chaque jour, sans vous expliquer pourquoi, n’est-ce pas là un risque de biais plus extrême ?
Valoriser le contenu de qualité
Il y a en revanche bien une promesse qui sort du lot dans le fonctionnement algorithmique d’Artifact : il est prévu que les systèmes d’apprentissage automatique priorisent le temps de lecture d’un contenu plutôt que le nombre de clics, d’impressions ou de commentaires associés.
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La promesse est aussi de valoriser les éditeurs sérieux et qui respectent des « normes éditoriales » comme celles partagées dans les secteurs du journalisme et de l’information auprès du public. Artifact touche là au nerf de la guerre en termes de régulation des réseaux sociaux et leur responsabilité vis-à-vis des contenus qui circulent sur leur plateforme.
Dans un article de The Platformer, Kevin Systrom est même allé plus loin en affirmant que sa société ne resterait pas neutre et serait prête à dépublier du contenu qu’elle juge désinformante. « L’un des problèmes actuels avec la technologie a été l’incapacité de beaucoup d’entreprises à faire des jugements subjectifs, au nom de la qualité et du progrès pour l’humanité », a-t-il ajouté. La méthode pour pallier la prolifération des fake news semble simple et claire. Les critères servant à définir le contenu de qualité le sont beaucoup moins…